Une partie des protons et des neutrons présents lors du Big Bang manquaient à l’appel, d’après la théorie de la nucléosynthèse primordiale et les observations. Mais les scientifiques sont de plus en plus convaincus de les avoir trouvés, cachés sous forme de noyaux légers, très chauds mais très peu lumineux. Ils seraient dans des filaments de matière, entre les amas de galaxies. Aujourd’hui, le satellite Chandra confirme cette thèse.
« Souvent dans l’erreur. Jamais dans le doute ! ». Cette célèbre déclaration du génial prix Nobel de physique Lev Landau, au sujet des cosmologistes, ne signifie pas qu’il ne prenait pas la cosmologie au sérieux. Et encore moins quand il s’agissait de la cosmologie relativiste développée par Friedmann et Lemaître : toute une partie de son cours de physique qui traite de la théorie des champs aborde le sujet par le calcul. Landau lui-même considérait l’existence de la fameuse singularité cosmologique comme l’une des plus importantes questions de la physique théorique.
Il faut bien admettre, qu’avant les années 1970 (Landau est mort en 1968), on ne savait presque rien en cosmologie, ni du point de vue théorique ni du point de vue observationnelle, bien que, rétrospectivement, les travaux de Lemaître, dans les années 1920 à 1930, apparaissent comme particulièrement pénétrants et en avance sur leur temps. Le paysage a bien changé depuis et de façon spectaculaire depuis le début du XXIe siècle au point que l’on peut vraiment parler de l’ère de la précision en cosmologie avec le modèle de concordance bâtie sur la matière noire et l’énergie noire.
Certes, l’inconnu se cache derrière ces deux composantes majeures de la densité de masse du cosmos observable à une échelle supérieure à celle des amas galactiques. Mais, grâce aux observations concernant entre autre le rayonnement fossile, les quasars, les supernovae et la distribution des galaxies, nos observations et nos théories ont pu être recoupées. Ainsi, il existe désormais un noyau de connaissances qui ne devrait pas plus changer que la théorie héliocentrique ne l’a fait avec les progrès de l’exploration du Système solaire.

Les protons perdus du Big Bang ont-ils enfin été retrouvés ? Ici, projection à grande échelle centrée sur l’amas de galaxies le plus massif dans la simulation Illustris. Elle montre la distribution de la matière noire en filaments (bleu, violet et pourpre), laquelle interagit gravitationnellement avec la matière ordinaire et favorise la formation des amas de galaxies. Les enveloppes de gaz teintées de rouge, rose ou orange sont principalement créées par l’explosion de supernovae ou les jets des trous noirs supermassifs. (Source : Illustris Collaboration)